Il y a souvent un mélange dans l'esprit du public entre Internet et Web, le second étant assimilé au premier, alors qu'il n'est qu'une application parmi d'autres qui utilise Internet. Internet est une évolution d'Arpanet, un réseau de communication mis au point dans les années 70 pour les besoins de l'armée américaine qui avait besoin d'un système de communication capable de résister à une attaque nucléaire (du moins l'idée a été "vendue" comme cela !). Un peu plus tard, le protocole TCP/IP a vu le jour, afin de normaliser le système d'échanges de paquets d'informations sur le réseau.
Dans le monde de la recherche, dans les années 80-90, il existait d'autres réseaux: DECNET par exemple permettait d'interconnecter des machines de la marque DEC (comme les VAX ) et était déjà très performant. Il était possible dans les années 90 de copier très simplement des fichiers d'un ordinateur à un autre et d'échanger des e-mails.
À la fin des années 80, le réseau EARN/BITNET était également très populaire dans les universités et les centres de recherche. BITNET a été de mon point de vue, le premier système qui a rendu possible les échanges d'informations entre chercheurs à un niveau mondial . Par la suite TCP/IP associé aux systèmes d'exploitations UNIX a complètement supplanté les autres protocoles et s'est imposé, dans le monde de la recherche, comme standard pour les échanges de fichiers et comme support pour le courrier électronique. Au même moment, on a commencé à voir fleurir toutes sortes de systèmes d'échanges d'informations: Listserv, Usenet, Gopher, WAIS, Archie, etc. Tout ces système correspondaient à un besoin croissant d'échanger de l'information et de la structurer. Finalement, c'est en 1991 que le World Wide Web inventé au CERN à Genève, a été dévoilé.
Je pense que c'est à partir des années 95-96 avec le développement de l'informatique familiale que le Web commence à apparaitre pour une utilisation grand public et c'est à peu près à la même époque que le courrier électronique commence à s'échanger en dehors du milieu strictement professionnel. Le Web a ensuite connu le développement que l'on sait avec des navigateurs de plus en plus performants, des contenus multimédia sophistiqués et une explosion du nombre de sites (plus de 200 millions début 2009, parait-il).
(ci-dessus, le logo original du World Wide Web proposé par Robert Cailliau - co-inventeur du Web avec Tim Berners-Lee).
Le Web est une mine d'informations ; dans peu de temps la quasi-totalité du savoir de l'humanité sera disponible en ligne. Les répercussions sont énormes puisque potentiellement tout être humain a la possibilité, d'accéder à la connaissance, du moment qu'il a accès à un terminal connecté à un réseau. Toute information, toute rumeur, est instantanément répercutée sur la toile, au risque de noyer les internautes sous un flot d'informations et de désinformations. Le terme de fracture numérique fait référence à l'exclusion de toute une partie de la société qui n'est pas assez riche pour disposer de cet accès aux technologies de l'information.
Le Web a considérablement évolué ces dernières années, bénéficiant de nouvelles technologies logicielles et matérielles ainsi que de l'augmentation de la capacité et des performances des réseaux. De temps en temps, de nouvelles applications apparaissent avec des répercussions sociétales majeures: Facebook, Twitter, Google, YouTube, MSN, Skype, etc. en sont des exemples. L'Internet fait évoluer la société vers un monde hyper-connecté et d'ores et déjà les "smart phones" permettent à tout un chacun d'avoir accès en permanence à ses e-mails ou au Web.
Dans quelques années ce seront la plupart des objets qui interagiront sur Internet, chaque élément devenant ainsi une source d'informations plus ou moins utiles. Cette explosion des sources de communication porte le nom "d'Internet des objets". À terme, voitures, objets domestiques, capteurs de toutes sortes seront connectés et déverseront des flots de données. La connexion des compteurs électriques des maisons et des entreprises permettra par exemple un suivi en temps réel des consommations et un ajustement très fin des sources de production. De même, on peut imaginer que la connexion des voitures sur le réseau permettra d'anticiper les saturations des axes de communication. Bien entendu, ceci n'est que le bon côté de l'hyper-connexion, le mauvais réside dans toutes les dérives possibles au niveau de l'ingérence dans la vie privée ou de la manipulation des masses.
Une autre voie actuellement explorée s'appelle le Web sémantique. Cette appellation recouvre l'ensemble des technologies permettant d'accéder à l'information de manière naturelle et quasi-humaine. Avec le Web sémantique, les moteurs de recherche pourraient par exemple être consultés en formulant les questions en langage naturel, avec tout ce que cela implique au niveau des sens cachés et des imprécisions. Le Web sémantique suppose le développement d'ontologies c'est-à-dire de systèmes permettant de modéliser les connaissances, les concepts et les relations qui les lient. C'est un domaine de recherche très complexe et personnellement je ne suis pas convaincu que les approches actuelles mènent bien loin...
Quelques tentatives récentes visent à rendre le Web plus "intelligent", par exemple "Google Squared" permet de construire des tableaux d'informations à partir de mots clés. Si on tape les mots clés "nobel prize physics", Google Squared construit une table proposant les noms des Prix Nobels, leur photo, leur date de naissance, de décès, etc… Rien d'extraordinaire direz-vous, sauf qu'en fonction des mots clés, le système est capable de "deviner" quelles sont les informations pertinentes. Il est également possible de demander l'ajout d'autres informations dans le tableau, par exemple le nom de l'époux ou épouse du Nobel ; Google Squared tente alors de trouver l'info et retourne celle-ci en lui associant un niveau de confiance… Ce ne sont que les premiers balbutiements, mais je pense qu'il y a là des idées intéressantes à creuser.
Pour finir, à mon avis, l'avenir du Web sera ce que j'appelle le Web Cognitif, c'est-à-dire un système qui permettrait d'organiser automatiquement l'information en fonction de stimuli : un stimulus pourrait par exemple être une dépêche de l'AFP qui déclencherait automatiquement la mise en relation d'un ensemble d'informations pertinentes permettant de comprendre le contexte et les implications de la nouvelle. Le Web cognitif devrait être capable de trouver lui-même des corrélations entre des éléments très divers et dispersés. Un tel outil, opérant sur la totalité du savoir de l'Humanité aurait une puissance colossale et ferait à coup sûr progresser la connaissance.
Dans la notion de web sémantique, il existe aussi le moteur de recherche "Wolfram Alpha" qui est capable de produire et d'assembler des données en fonction de la requête.
RépondreSupprimerEffectivement, j'avais entendu parler de Wolfram Alpha. Je viens de réessayer, c'est intéressant. Par exemple: la requête "Hubble tomorrow" montre une carte de la trajectoire du télescope spatial demain à 12h et sort un tableau avec diverses données. Les possibilités de calcul formel sont également pas mal.
RépondreSupprimerMerci pour cet article. Depuis ce matin, je lis allant de lien en lien l'histoire du web... Que de bons souvenirs qui reviennent ! Je me souviens avoir grandi en même temps que ca mais j'étais loin de me douter que je faisais partie des premiers internautes.
RépondreSupprimerJ'ai du mal a croire que cela a 20 ans, que nous avions internet à la maison moins de 10 ans après sa création. Je me souviens surfer dans le milieu des années 90.
Je me souviens de napster, ICQ, AOL qui déconnecte automatiquement, netscape et son phare, altavista, les abonnements non illimités, le 33 et le 56k, les fraudes qui consistaient a prelever de l'argent en se servant des abonnements, les pop-up non bloquées, la navigation sans onglets, l'inexistence des plateformes blog, ma création de sites web en tapant le HTML.
Je suis un peu perdu maintenant, autant il y a 10 ans, je savais et maitrisais tout d'internet, je suis désormais dépassé, je deviens un consommateur lambda qui na aucune idée du code qui se cache derrière les sites qu'il visite.
Et oui, vous avez grandi avec. Les copines de ta soeur venaient à la maison pour faire des exposés car nous étions les seuls du village à avoir accès au web.
RépondreSupprimerJe parle de San Francisco avant ca. Peut etre que cela semblait normal pour nous (moi?) vu le milieu dans lequel nous avons ete projetes.
RépondreSupprimerJe me souviens aussi des journees internet a ton labo, tout cela se passait avant 1998.
Je me souviens qu'en 2000, je passais pour un extraterrestre au lycee parce que j'avais un ordinateur portable :-)
En tout cas, la France est tres en avance actuellement sur les etats unis en ce qui concerne l'acces a internet.
RépondreSupprimerLe triple play coute ici une fortune (plus de $100).
L'arrivee de Free doit etre consideree comme une revolution en france...
Sylvain, en 1987, je retravaillais la saisie de la thèse de ton père de la maison, lui au labo! Combien de fois je me suis retrouvée sur les comptes de ses collègues qui ne fermaient pas leur session ! J'en ai d'ailleurs profité pour leur faire des blagues ! Chut !!!
RépondreSupprimerArgh ! Ta maman pirate avant l'heure !
Quoi ? nous avions un ordinateur a la maison en 1987 ? Si mes souvenirs sont bons nous n'avions qu'un minitel.
RépondreSupprimerRires pour ma maman pirate :-)
Ma thèse c'était en 1986. Nous avions un terminal à la maison et un modem à 4800 bauds qui se connectait sur le VAX du labo. Le traitement de texte était TeX (l'ancêtre de LaTeX). Impossible d'intégrer les figures, il fallait laisser un blanc et ensuite c'était "cut and paste" mais au sens propre... avec des ciseaux et de la colle !
RépondreSupprimerEt en effet, lorsque que quelqu'un ne fermait pas correctement sa session, celui qui se connectait derrière arrivait dans la session du collègue avec accès à tous les fichiers.
Quant à toi et Gaël, votre grand plaisir était que je mette le terminal en mode "écho local" ce qui vous permettait de taper sur le clavier et de voir les caractères s'afficher sur l'écran :-)
je me souviens du terminal mais je croyais que c'etait lorsque nous avions demenage a la campagne. Je me souviens de l'emerveillement de taper du texte et le voir apparaitre a l'ecran mais je croyais que c'etait sur le minitel...
RépondreSupprimerApparemment mes souvenirs ne sont pas tres justes ;-)
@Syvain: On faisait des maths sur le minitel. J'ai aussi souvenir d'un terminal de couleur beige que l'on doit encore avoir dans le grenier du garage.
RépondreSupprimerSi ma mémoire est bonne, il me semble que l'une de tes toutes premières recherche avait porté sur la cathédrale Saint-Paul de Londres, et ce n'était pas si aisé (pas de Wiki à l'époque).
J'ai aussi souvenir que les premières recherches sur nos prénoms aboutissaient à des page sur la sagesse et à l'esprit de la forêt pour "sylvain", à des casinos et du porno pour "gael".
La technologie redoublait d'ingéniosité pour pouvoir afficher les images (j'ai souvenir d'un modem 14k), la solution étant souvent de les afficher "après avoir chargé le texte" en commençant par un preview flou.
La toute magnificence de Netscape était "la pluie de météorites" dans l'icône pour indiquer qu'un chargement était en cours. A l'époque Altavista était "le" moteur de recherche. On pouvait aussi utiliser "Copernic" permettant une multirecherche aboutissant surtout à une perte de temps, les résultats se faisant attendre 3 plombes et étant plus incohérents les uns que les autres.
Le navigateur Opera faisait déjà sa pub avec "the fastest browser on Earth". Un excellent navigateur que personne n'utilisait (ce qui est toujours le cas aujourd'hui :o) )
La grande question à la maison était surtout de savoir s'il fallait souscrire à un abonnement numeris (RNIS) permettant d'obtenir un débit de 128kb/s en combinant deux lignes téléphoniques.
Les Etats-unis ont très vîtes accrochés sur internet car aux USA la communication téléphonique locale était gratuite, ce qui ne permettait de ne payer que l'abonnement internet pour la connexion (et non abonnement + coût de la comm). AOL était une plaie, avec une campagne publicitaire très agressive à grand coup de "300 minutes gratuites". On l'avait remplacé par quelques fournisseurs gratuits, dont "Bluelight".
Je me souviens aussi du premier PC familiale, un e-machine dont le bas prix justifiait une pub occupant 1/3 de l'écran (que l'on s'est vite empressé de virer).
De retour en France, c'est l'opérateur Oreka qui fut révolutionnaire en créant une offre 100% gratuite (France Télécom inclu) en l'échange d'une bannière de pub. Ils firent rapidement faillite. On passa ensuite à LibertySurf ayant débuté avec des prix très agressifs. Malheureusement leur offre tourna rapidement à la quasi-arnaque, avec une facturation illisible et du temps hors-forfait hors de prix. Et c'est ainsi que "Free" à commencé: en offrant un service gratuit (au tarif de la comm), sans arnaque, avec une qualité de service incomparable.
@Kwak: Quelle mémoire ! Tes souvenirs sont justes. Je n'arrivais plus à retrouver le nom du fournisseur Internet gratuit à San Francisco: Bluelight... bien sûr !
RépondreSupprimerLe e-machine était un excellent ordinateur. C'était un Pentium II à 500 MHz si je me souviens bien. Il coutait 500$ sans l'écran. Je pense qu'il marche toujours !
@Alvin: Je pencherais plus pour un pIII à 450 MHz.
RépondreSupprimerQuand j'y pense, on n'a pas du garder AOL très longtemps (quelques mois tout au plus). Elle est loin cette époque où on pouvait se débarrasser d'un abonnement quand on le voulait ! :D
Bluelight a du être racheté par Yahoo! par la suite.
Pour le PC, je me souviens qu'il y avait une grosse réduc en "mail-in-rebate". C'était très à la mode, il y avait pour un peu tout et n'importe quoi aux US.
Plus étonnant encore, l'écran (Nec) est toujours en cours d'utilisation (intensive), increvable cette bête là ! Pourtant, on avait eu quelques doutes aux premières heures, il dégageait une forte odeur de cramé et il fumait un peu !
Ahah je me souviens de l'abonnement gratuit qui marchait avec de la pub.
RépondreSupprimerPour moi les premiers souvenirs, c'est Yahoo!, Altavista, ICQ et les tchats Caramail.