La cosmologie arrive relativement bien à expliquer l'enchainement des processus physiques qui, depuis le BigBang ont conduit à l'Univers observable que nous connaissons. Toutefois, lorsque l'on regarde de près les processus mis en jeu, on se rend compte que l'édifice est très fragile et qu'une infime perturbation aurait suffit à le faire écrouler. En effet, un certain nombre de lois physiques et de constantes fondamentales doivent être ajustées avec une précision extrême (on parle de "fine tuning" en anglais) sous peine d'obtenir une évolution de l'Univers complètement différente. Par exemple, les conditions d'obtention de la nucléosynthèse, c'est-à-dire du processus de constitution des premiers noyaux des éléments simples (l'hydrogène par exemple), reposent sur des grandeurs physiques qui, si elles avaient été modifiées, ne serait-ce que par une fraction minuscule, auraient rendu cette nucléosynthèse impossible. La formation des étoiles, gigantesques machines à fabriquer les éléments plus lourds, n'aurait pas eu lieu non plus, et ainsi de suite... L'ajustement des grandeurs physiques impliquées dans l'expansion de l'Univers doit être précis jusqu'à une centaine de décimales, le moindre écart conduisant soit à un Univers qui se recontracte immédiatement après sa naissance, soit qui se disloque avant d'avoir pu donner naissance aux grandes structures cosmiques. Dans ces conditions, notre existence même repose sur un hasard incroyable, des probabilités tellement infimes qu'elles bouleversent le sens communs et qu'elles doivent donc cacher quelque chose de plus fondamental.
Un élément important à prendre en compte est le fait que la physicienne cosmologiste qui étudie l'Univers fait elle-même partie de celui-ci. C'est une situation curieuse en physique où l'observateur fait habituellement en sorte d'étudier un système en le regardant évoluer depuis l'extérieur. Le fait d'être partie intégrante du système, conduit à un raisonnement qualifié d'anthropique (à ne pas confondre avec "entropique") qui énonce que si l'être humain Est, et se pose des questions sur son existence, c'est que l'Univers dans lequel il vit ne peut être que comme cela, puisque s'il était différent, nous ne serions pas là pour nous poser la question ! J'ai le sentiment sans pouvoir l'expliquer clairement que ce principe anthropique est indissociable du fait que la notion de temps commence avec le BigBang; si on appelle "éternité" l'absence de temps, alors on peut imaginer que l'Univers surgit de l'éternité, crée son propre temps et évolue vers n'importe quel état possible. D'une certaine manière, l'éternité est tellement longue (!) que même ce qui est infiniment improbable arrive toujours...
Une autre façon de voir les choses, mais qui n'est peut-être pas si différente, est d'imaginer qu'il existe un très grand nombre, voire une infinité d'Univers ayant chacun leurs propres lois et constantes physiques. Parmi tous ces Univers, certains ont les bonnes caractéristiques pour évoluer vers un système pouvant engendrer la vie et l'intelligence, d'autres n'ont jamais pu créer les éléments simples et sont dominés par le rayonnement, d'autres encore ont évolué vers des états inimaginables pour un Humain. Si cette approche est la bonne, notre Univers ne serait alors qu'un élément d'un objet beaucoup plus complexe, le Multivers. Ceci ne fait finalement que prolonger l'aspect "fractal" de l'Univers. Du temps d'Edwin Hubble, les galaxies étaient des univers îles, le Multivers est encore au-delà.
Le numéro d'avril de "Pour la Science" contient un article très intéressant sur ce sujet...
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